Dans la même rubrique
-
Partager cette page
Être citoyen à l’ère du numérique et de la pandémie
Publié le 18 décembre 2020
– Mis à jour le 18 décembre 2020
De nombreux pays réfléchissent à un système de traçage pour gérer la propagation du virus. À Bruxelles, au sein du groupe OPERA – WCG à l’Ecole Polytechnique de Bruxelles, Jean-François Determe développe un outil pour monitorer les foules tout en garantissant l’anonymisation des données récoltées.
Vous dirigez le projet MUFINS qui permet notamment de monitorer des foules. C’est aussi un outil utile face à la pandémie ?
Jean-François Determe : Oui, notre technologie repose sur des senseurs Wi-Fi qui détectent de façon passive les signaux balises transmis par les téléphones portables avec le Wi-Fi allumé. Nous avons installé ces senseurs sur la rue Neuve à Bruxelles ainsi que sur les différents campus de l’Université. Ils nous permettent d’estimer et de quantifier dans quelle mesure les règles de confinement et de déconfinement impactent la fréquentation de ces lieux. Cette technologie est surtout utile en phase de déconfinement. Depuis le 8 juin, le système permet d’évaluer la fréquentation de la rue Neuve et par la suite, de vérifier le respect du couvre-feu.
Quels sont les avantages de MUFINS par rapport à d’autres systèmes, notamment les caméras ?
Jean-François Determe : L’avantage est que le calcul du nombre de « transmissions Wi-Fi » et donc du nombre de personnes dans une zone donnée se fait de manière presqu’instantanée, le système n’a donc pas besoin de tracer des individus au cours du temps. Le système d’anonymisation que nous avons conçu nous empêche même de le faire: impossible de tracer un individu même de façon anonyme. C’est également une technologie qui permet à chacun de s’y soustraire : si vous désirez ne pas être pris en compte, il vous suffit de désactiver le Wi-Fi sur votre téléphone. C’est donc une technologie respectueuse de la vie privée, qui est aussi peu onéreuse et facile à déployer. Son plus gros désavantage découle en réalité directement de ces avantages : vu la forte anonymisation, nous ne pouvons pas calculer facilement les flux, c’est-à-dire le sens que les individus ont tendance à prendre dans une zone.
Des dérives sont-elles possibles ?
Jean-François Determe : Que ce soit pour MUFINS ou pour d’autres systèmes de monitoring de foule, il faut prendre garde à leur généralisation au-delà des centres urbains ou des hauts lieux événementiels. Déployer les systèmes de comptage de façon massive dans des milieux sous-urbains n’a pas beaucoup d’intérêt et pourrait faciliter la surveillance de masse. Par ailleurs, il faut s’assurer que les données captées par les différents systèmes déployés ne puissent pas être recoupées. Une telle pratique pourrait permettre de tracer un individu de façon précise. Enfin, toutes les mesures d’autolimitation (l’anonymisation forte par exemple) qui vont restreindre les capacités des systèmes de comptage doivent être d’application, quel que soit le commanditaire : privé ou étatique. La sensibilité de chaque donnée collectée et de chaque système de surveillance déployé aujourd’hui devrait, je pense, être évaluée dans la perspective d’un hypothétique glissement autoritaire.
Lire la suite
Jean-François Determe : Oui, notre technologie repose sur des senseurs Wi-Fi qui détectent de façon passive les signaux balises transmis par les téléphones portables avec le Wi-Fi allumé. Nous avons installé ces senseurs sur la rue Neuve à Bruxelles ainsi que sur les différents campus de l’Université. Ils nous permettent d’estimer et de quantifier dans quelle mesure les règles de confinement et de déconfinement impactent la fréquentation de ces lieux. Cette technologie est surtout utile en phase de déconfinement. Depuis le 8 juin, le système permet d’évaluer la fréquentation de la rue Neuve et par la suite, de vérifier le respect du couvre-feu.
Quels sont les avantages de MUFINS par rapport à d’autres systèmes, notamment les caméras ?
Jean-François Determe : L’avantage est que le calcul du nombre de « transmissions Wi-Fi » et donc du nombre de personnes dans une zone donnée se fait de manière presqu’instantanée, le système n’a donc pas besoin de tracer des individus au cours du temps. Le système d’anonymisation que nous avons conçu nous empêche même de le faire: impossible de tracer un individu même de façon anonyme. C’est également une technologie qui permet à chacun de s’y soustraire : si vous désirez ne pas être pris en compte, il vous suffit de désactiver le Wi-Fi sur votre téléphone. C’est donc une technologie respectueuse de la vie privée, qui est aussi peu onéreuse et facile à déployer. Son plus gros désavantage découle en réalité directement de ces avantages : vu la forte anonymisation, nous ne pouvons pas calculer facilement les flux, c’est-à-dire le sens que les individus ont tendance à prendre dans une zone.
Des dérives sont-elles possibles ?
Jean-François Determe : Que ce soit pour MUFINS ou pour d’autres systèmes de monitoring de foule, il faut prendre garde à leur généralisation au-delà des centres urbains ou des hauts lieux événementiels. Déployer les systèmes de comptage de façon massive dans des milieux sous-urbains n’a pas beaucoup d’intérêt et pourrait faciliter la surveillance de masse. Par ailleurs, il faut s’assurer que les données captées par les différents systèmes déployés ne puissent pas être recoupées. Une telle pratique pourrait permettre de tracer un individu de façon précise. Enfin, toutes les mesures d’autolimitation (l’anonymisation forte par exemple) qui vont restreindre les capacités des systèmes de comptage doivent être d’application, quel que soit le commanditaire : privé ou étatique. La sensibilité de chaque donnée collectée et de chaque système de surveillance déployé aujourd’hui devrait, je pense, être évaluée dans la perspective d’un hypothétique glissement autoritaire.
Lire la suite
Mathieu Léonard